Soupçons de déstabilisation en Sierra Leone, théorie des dominos ou du complot ?

L’histoire s’accélère. Dans l’avion à destination de l’Afrique nouvelle, on compte chaque passager avant l’embarquement. L’Afrique de l’Ouest, en particulier, semble se scinder en deux fronts, qui se qualifient mutuellement de « démocraticides » et de « démocrates fantoches ». La prise du pouvoir par le général Abdourahamane Tiani est la dernière pièce du jeu de dominos, de cette avalanche de putschs plus ou moins imbriqués qui pourrait se répandre des pays enclavés vers la côte, déjà chahutée par la la junte de Mamadi Doumbouya.

Non loin de Conakry, en Sierra-Leone, les dernières annonces des autorités en matière de sécurité traduisent-elles la crainte de voir des apprentis putschistes, qui se ruent vers les ors des palais, constituer une escouade de choc face à une – très hypothétique – force anti-coup d’État de la Cedeao ?

Bien que prudents, les observateurs étrangers dénoncent régulièrement le « recours excessif à la force » du régime de Julius Maada Bio, réélu président en juin, ainsi que des restrictions à l’accès à internet, des « incohérences statistiques » dans le décompte des votes, et l’absence de participation de l’opposition à quelque niveau de gouvernance que ce soit. La Sierra Leone a, en tout cas, un témoignage à offrir en matière de coup d’État, elle qui vit intervenir sur son sol l’Ecomog, plus célèbre groupe militaire d’intervention placé sous la direction de la Communauté ouest-africaine…

L’école du complot permanent

Dans la soirée du 31 juillet, la police sierra-léonaise a affirmé avoir arrêté plusieurs personnes, dont des officiers supérieurs, qui planifiaient « de violentes attaques » destinées « à saper la paix et la tranquillité de l’État ». Dans un pays qui a déjà connu des putschs et, en août 2022, des émeutes qui ont causé la mort de 27 civils et de 6 policiers, cette information n’est pas anodine. Si les mots « tentative de coup d’État » ne sont pas encore sur toutes les lèvres, le communiqué de la police évoque bien un projet d’attaques « contre les institutions de l’État » sous couvert de « manifestations pacifiques prévues pour la semaine prochaine ».

Or comment éviter l’un de ces coups d’État que l’on décrit comme « populaires » sinon en « devançant l’iguane dans l’eau » ? Nombre de dirigeants actuels ont largement appris de l’ère Sékou Touré et de son « école du complot permanent ». Si la survenue d’un putsch est souvent source de création de fake news, l’annonce de l’imminence d’un putsch peut parfois être elle-même une fake news…

Jeune Afrique

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