Kédougou : les villages du Plateau de Dindé Félo étalent leurs maux

Nous quittons Kédougou, cette ville du Sud-est du pays arrosée depuis le début de l’hivernage par des pluies torrentielles. Après plus de trente minutes de trajet à moto, sur une piste boueuse, glissante et un relief accidenté, se profilent à l’horizon, les cases qui se dressent fièrement au sommet du plateau de Dindé Félo.

Dandé, Diogoma, Afia, Badiary et Nandoumary, cinq hameaux de la commune de Dindé Félo, qui ne sont situés qu’à 45 kilomètres de Kédougou, leur chef-lieu de région, sont très difficiles d’accès. Il faut encore patienter des heures pour y arriver enfin. Peuplés de plus de deux mille habitants, les villages du Plateau doivent surtout leur réputation à la cascade qui a fait de la zone environnante une attraction touristique.

Sur place, après les salutations d’usage, les chefs de village sont très prompts à aborder les goulots d’étranglement du décollage de leurs localités respectives et à témoigner des difficiles conditions de vie des populations.

Les cinq villages du Plateau de Kédougou sont confrontés à trois principaux problèmes, à savoir le manque d’infrastructures sociales de base, l’inexistence de route et la faible couverture du réseau mobile sénégalais, plus particulièrement à la frontière entre le Sénégal et la République de Guinée.

‘’On souffre trop’’, relève l’un d’eux. ‘’Nous ne disposons pas d’infrastructures sociales de base. Les malades et les femmes enceintes souffrent, faute de moyen d’évacuation (ambulance). Il y a aussi l’enclavement des villages du plateau qui encourage le banditisme’’.

‘’L’insécurité prend des proportions inquiétantes avec des braquages armés’’, alertent-ils.

Le président du Conseil communal de la jeunesse (CCJ) de Dindé Félo, Mamadou Ba, interpelle l’Etat sur la situation que vivent ces communautés isolées et implantées en altitude.

Pour éviter le pire, préconise-t-il, ‘’il faut faire reculer la montée du banditisme et la circulation des armes blanches et légères qui est en train d’y prendre forme. L’Etat doit prendre à-bras-le-corps la question sécuritaire dans la zone frontalière avec Guinée Conakry’’.

Selon une source sécuritaire, la brigade mobile de la gendarmerie de Kédougou et la police des frontières mènent des patrouilles nocturnes et installent nuitamment des check-points dans la zone.

Carim Camara, un habitant de Dindé Félo souhaite que le réseau mobile sénégalais soit activé dans les villages du Plateau, pour assurer la sécurité des personnes et des biens.

‘’Dans certains villages de la montagne, tu es entièrement en Guinée Conakry’’, relève-t-il, ajoutant que sans numéro guinéen, il est impossible de communiquer à partir de là. Il se souvient du jour où un incendie s’était produit à Dandé, et les gens ne pouvaient pas appeler sur toute l’étendue du plateau, faute de réseau.

Le maire de la commune de Dindé Félo, Kikala Diallo salue le démarrage par l’Etat des travaux de construction de la route, tout en déplorant le manque d’électricité dans sa localité, visitée par beaucoup de touristes  qui viennent pour sa cascade et sa réserve naturelle.

‘’C’est une commune touristique mais malheureusement Dindé Félo n’a pas d’électricité. Nous voulons du courant pour retenir les touristes et leur faire visiter le plateau et la réserve naturelle’’, souligne le maire.

Les hameaux du Plateau qui abritent parmi les sites touristiques les plus fréquentés de la région, manquent de tout et sombrent dans le noir.

Les chefs de village du Plateau, après moult tentatives pour freiner les agressions et autres braquages dans leur zone, demandent à l’Etat de prendre des dispositions pour garantir le plein épanouissement des populations.

Niché dans la commune de Dindé Félo, le Plateau surplombe une vaste forêt touffue, composée d’une faune et d’une flore très riches.  A 450 mètres d’altitude, le site abrite des espèces rares, comme le chimpanzé et la panthère, ainsi que des arbres comme le fromager. De ses flancs, jaillit sa fameuse cascade, du haut de ses 115 mètres, soit la plus haute du pays. S’y ajoutent bien d’autres sites remarquables, comme les dents de Dandé, la source de la cascade et la grotte.

Le plateau fait partie du paysage culturel peul du pays Bassari. Ses atouts d’écotourisme, de tourisme de vision ne sont plus à démontrer, avec son label de zone pour la conservation des oiseaux.

Tel un bijou que la nature a protégé par toute sorte d’obstacles, afin de le préserver de la banalisation et de faire de sa découverte une récompense pour ceux qui ont su faire preuve de persévérance. Une beauté que peinent pourtant à savourer pleinement ses habitants, assaillis par un dénuement quasi-total et des maux multiples.

APS

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