Voyager sans argent et écolo ? Voici comment faire

Auto-stop, bivouac, récupération d’invendus alimentaires… Il est possible de voyager sans dépenser et en limitant son impact sur l’environnement, explique l’auteur de cette tribune.

Depuis 2012, Jérôme Constantin parcourt le monde avec des moyens de transport inhabituels et écologiques, en finançant ses voyages avec la rédaction web et les cours en ligne.


Je rêvais de voyager à travers la planète, mais mon banquier n’était pas du même avis. Et surtout, je voulais la parcourir en réduisant le plus possible mon empreinte écologique. Je vous livre aujourd’hui les solutions que j’ai trouvées pour voyager sans un sou en poche, tout en respectant l’environnement.

Voyager en auto-stop, bateau-stop… et avion-stop ?

Le problème qui s’est d’abord posé à moi était celui du transport : comment se déplacer sans se ruiner et sans impact sur la nature ?

L’auto-stop est une bonne alternative. Mes convictions me font haïr les voitures, mais en montant dans un véhicule qui aurait fait le trajet de toute façon j’ai la conscience tranquille : le bilan carbone est le même. Faire du pouce fonctionne très bien dans la grande majorité des pays. En plus de voyager gratuitement, vous ferez des rencontres inoubliables et serez souvent invités à manger un morceau ou à dormir chez l’habitant. Et l’auto-stop n’est pas une activité spécialement dangereuse, à condition d’appliquer quelques règles élémentaires de sécurité.

J’ai trouvé sur le site Hitchwiki.org de conseils aux autostoppeurs pays par pays, des informations utiles pour sortir de l’immense agglomération de Buenos Aires et trouver le spot parfait à l’entrée de l’autoroute de l’Ouest. J’y ai aussi appris que les pompiers sud-américains hébergeaient parfois les voyageurs perdus, et cela m’a tiré d’affaire à plusieurs reprises.

Le bateau-stop est plus difficile. Le principe est le même que pour l’auto-stop : trouver un bateau prêt à vous embarquer. Pour cela, vous devez aller au port à la rencontre des propriétaires de voiliers. Si vous avez de la chance, vous trouverez un skipper qui cherche des coéquipiers.

Personnellement, j’ai fait l’impasse sur les cargos et les porte-conteneurs : même s’ils sont plus rapides, leur équipage n’a pas le droit de vous emmener à cause des règles des compagnies d’assurance. Et je supporte mal la vue de ces monstres d’acier qui polluent les océans.

L’avion-stop existe aussi ! Seulement, il relève de l’exploit : la seule manière est d’aller demander à des pilotes de vous embarquer dans les aéroports privés. Je n’essaierai jamais : même si vous prenez un véhicule qui aurait fait le trajet de toute façon, vous risquez d’encourager le trafic aérien.

Plus lent : le vélo ? La rando ?

En commençant à voyager, j’ai découvert les mérites de la lenteur : en prenant son temps, on découvre plus de choses, on s’attarde sur les détails. C’est pour cette raison que voyager à vélo a un charme infini. En plus d’être sain et écologique, ce mode de transport est extrêmement bon marché. J’ai traversé l’Irlande en pédalant, longé les côtes françaises de Calais à Arcachon, et j’en garde des souvenirs inoubliables !

Certains poussent l’amour de la lenteur jusqu’à voyager à pied. Avec vos jambes comme seul moyen de transport, vous découvrirez des splendeurs méconnues. Vous ferez aussi davantage de rencontres. Deux de mes amis ont traversé l’Europe sans véhicule : cette expérience a changé leurs vies et transformé leur vision du monde. Caroline Moireaux, une aventurière des temps modernes, a même fait le tour du monde à pied !

Camping sauvage ou « couchsurfing » ?

J’ai souvent passé mes nuits à la belle étoile, à la campagne comme dans les villes. Si vous n’avez pas ma témérité, il existe bien d’autres solutions.

Le bivouac, plus couramment appelé « camping sauvage », consiste à planter sa tente dans des endroits discrets. Contrairement à une idée très répandue, cette activité n’est pas illégale dans la plupart des pays. Elle est interdite dans certains lieux — principalement les agglomérations, les forêts domaniales et les parcs naturels — mais très largement tolérée ailleurs, à condition de ne pas s’installer pour plus d’une nuit. Pour faire votre toilette, les options ne manquent pas, entre les fontaines, les rivières, les douches aux abords des plages et les sanitaires des stations-service. En plusieurs milliers de kilomètres de voyage alternatif, j’ai rarement été sale plus de quelques heures.

Dormir chez l’habitant est une option plus confortable, surtout si vous voyagez l’hiver. Le principe est simple : demander aux locaux si vous pouvez venir chez eux pour la nuit. Et ça marche souvent très bien, une fois la timidité vaincue. L’idée m’est venue en regardant l’émission « J’irai dormir chez vous » : sans caméra embarquée, je vous assure que ça marche aussi, à condition de ne pas se décourager.

Vous ne voulez pas abuser de la générosité des gens ? En réalité, il y a toujours un donnant-donnant : on vous reçoit et en échange vous apportez votre compagnie, votre conversation et votre bonne humeur. À travers vous, votre bienfaiteur voyage un peu. Pour moi, c’est aussi l’occasion d’aborder les questions environnementales et de sensibiliser encore plus de gens à la protection de la nature. Après une conversation avec un hôte espagnol, celui-ci a décidé de se mettre à trier ses déchets. Nous sommes restés amis et il m’affirme avoir convaincu son entourage de faire le même geste.

Ce principe a tellement de succès que de nombreux sites lui sont dédiés, à commencer par le célèbre Couchsurfing. Pour dormir chez l’habitant, deux solutions s’offrent à vous : rencontrer vos hôtes sur place en vous fiant à votre bagout ou vous y prendre à l’avance en utilisant internet. J’apprécie les deux : lors de mon dernier périple, j’ai parcouru la Suède sans débourser un centime pour mon hébergement. Et tout ça grâce à la Toile !

Alimentation : la récup’

Pour que mon voyage soit vraiment gratuit et écologique, il m’a fallu découvrir des solutions audacieuses pour me nourrir.

Savez-vous combien de millions de tonnes de nourriture comestible sont jetées tous les jours ? Chaque restaurant, chaque boulangerie, chaque supermarché se débarrasse quotidiennement de dizaines de kilos d’invendus, qui finissent dans les poubelles. Peu nombreux sont les voyageurs qui osent « mendier » leur nourriture aux commerçants. Pourtant, cette récupération est beaucoup moins choquante que l’abominable gaspillage dont nous venons de parler. Manger ce qui va être jeté est un acte écologique.

Pour cela, il faut ravaler son orgueil et demander tout simplement dans les épiceries, les marchés, les restos et tous les commerces de bouche si vous pouvez récupérer ce qu’ils s’apprêtent à balancer. Préférez les petites enseignes aux grandes chaînes de magasins. C’est dans les épiceries de quartier que j’ai fait les meilleures récoltes. Entre les produits frais et ceux qui périment le lendemain, vous trouverez largement de quoi vous remplir la panse !

Astuces en vrac

  • Pour recharger vos appareils électroniques gratuitement, pensez aux prises disponibles dans les gares, les centres commerciaux et les points information-tourisme. Certaines sont alimentées par votre pédalage sur un vélo immobile : ainsi, vous êtes certain d’utiliser de l’énergie propre. Je fais souvent ce sport en rechargeant mon téléphone et en lisant un bon bouquin, dans l’allée centrale de la station Montparnasse.
  • Pour un free Wifi, les possibilités sont innombrables : alentour des cafés (des fast-food aussi, mais je les fuis comme la peste), bornes publiques, bibliothèques, etc.
  • Beaucoup d’activités touristiques sont gratuites : plages, parcs, espaces naturels, musées nationaux dans la plupart des pays, lieux de culte, quartiers historiques. Et allez faire un tour sur Couchsurfing pour les événements ayant lieu dans chaque ville. Vous y trouverez notamment des « free walking tour », formule de visites guidées gratuites de plus en plus fréquentes. Un étudiant farfelu m’a fait découvrir Sydney de cette manière, en régalant son vaste auditoire d’anecdotes savoureuses.
  • La plupart des auberges de jeunesse recherchent régulièrement du personnel, n’hésitez pas à leur proposer vos services pour quelques semaines : contre une vingtaine d’heures de travail par semaine, on vous donnera souvent un lit et de quoi manger. C’est ce qui m’est arrivé au Youth Hostel d’Adelaide, alors qu’il ne me restait plus que quelques dollars. Le principe « quelques heures de travail contre le gîte et le couvert » existe aussi dans les fermes biologiques du monde entier et dans des centaines de relais associatifs. Faites votre demande à l’avance sur les sites Wwoofing, Helpx et Workaway. Le premier m’a permis de rencontrer une communauté de doux dingues de l’Aveyron, chez qui le travail se fait toujours dans la bonne humeur et la rigolade.
  • Enfin, les deux livres que j’ai toujours dans mon sac de voyage sont La bible du grand voyageur, éditée par Lonely Planet, et Sans un sou en poche de Benjamin Lesage, aventurier écologiste ayant parcouru l’Europe, l’Afrique du Nord et l’Amérique latine sans débourser un centime.

Alors, qu’attendez-vous pour partir ? Désormais, le manque de moyens n’est plus un prétexte. C’est presque une chance en réalité : en étant forcé de vous débrouiller, vous serez forcé d’aller vers les autres et votre voyage n’en sera que plus intense. Et surtout, vous saurez que votre exploration ne contribue pas à abîmer la planète, que nous avons le devoir de protéger.

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