Sous les talibans, les Afghanes n’avaient «même pas le droit à l’air offert par Dieu»

Sadiqa Hamid vit à Strasbourg avec son mari et ses trois enfants depuis 2016. Alors que des milliers d’Afghans cherchent à fuir leur pays et le retour des talibans, elle se souvient de l’époque où le groupe fondamentaliste était au pouvoir pour la première fois dans son pays. Elle raconte à RFI, la peur quotidienne et la résilience dont elle a dû faire preuve jusqu’à la chute du régime, ainsi que les raisons qui l’ont poussée à partir de l’Afghanistan.
Sadiqa Hamid est belle et a dans les yeux ce quelque chose qui met tout de suite à l’aise. À ses côtés on se sent bien et, lorsque sa voix cristalline raconte, on se tait et on écoute. Son histoire, comme celle de son pays, est triste.
Sadiqa est arrivée en France en 2016 avec son mari et ses trois enfants. Le voyage a été long: d’abord la Turquie, puis l’Italie, Paris et enfin Strasbourg. « Aujourd’hui on se dit qu’au moins nos enfants auront un avenir », affirme-t-elle en regardant tendrement sa fille.
Le retour des talibans en Afghanistan le 15 août dernier propulse cette femme de 45 ans des années en arrière, lorsqu’elle n’avait que 20 ans et que le groupe fondamentaliste avait pris pour la première fois le pouvoir dans son pays : « J’étais étudiante, je venais de me marier. Je voulais faire des études de droit » se rappelle-t-elle.
Lorsque les talibans sont arrivés, « tout a changé dans nos vies. Surtout pour celles qui, comme moi, avaient grandi libre », soupire-t-elle. « Au début, les talibans ont annoncé que les femmes devaient juste porter le hijab islamique puis, une fois installés, ils nous ont demandé de cacher notre visage et finalement nos yeux. On ne pouvait même pas soulever notre burqa deux secondes pour respirer. Je me souviens que j’étais enceinte de mon premier enfant et que c’était parfois très dur. Une fois, alors que j’étais avec ma mère et mon frère, j’ai simplement soulevé un instant ma burqa pour prendre l’air et là, sorti de nulle part, un taliban est venu et nous a fouetté tous les trois. La douleur des coups a duré plusieurs jours. Nous n’avions même pas le droit à l’air offert par Dieu », s’indigne-t-elle.
Avant le régime taliban, Sadiqa avait même eu l’occasion de voyager en Russie pour des séminaires ou pour des études linguistiques. Du jour au lendemain, elle a dû arrêter ses études, ne pouvait plus entrer seule dans un magasin et était, comme toutes les femmes afghanes, cantonnée au huis clos du foyer avec la cuisine et l’éducation des enfants comme seules occupations. « Tout était interdit : la TV, les cassettes, la musique….les talibans écoutaient aux portes et s’ils entendaient de la musique, ou le rire des femmes, ils entraient. Ils n’avaient qu’une radio officielle où ils diffusaient les châtiments infligés aux uns et aux autres pour faire peur à la population », ajoute-t-elle.

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