Présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire : Tidjane Thiam renonce à la nationalité française, mais la justice ivoirienne complique sa course

Alors qu’il ambitionne de briguer la magistrature suprême, Tidjane Thiam se heurte à un imbroglio juridique : la Côte d’Ivoire considère qu’il n’est plus Ivoirien depuis 1987

L’annonce a été solennelle, presque historique : Tidjane Thiam, ancien patron du Crédit Suisse et figure de proue du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), a renoncé à sa nationalité française. Un geste fort, destiné à balayer les doutes sur sa loyauté nationale alors qu’il s’apprête à entrer dans l’arène présidentielle de 2025. Mais voilà que la justice ivoirienne jette un pavé dans la mare : selon elle, Thiam a perdu sa nationalité ivoirienne depuis 1987, année où il a acquis la nationalité française.

Une déclaration qui fait l’effet d’une bombe dans le paysage politique ivoirien. Peut-on briguer la présidence d’un pays dont on n’est, juridiquement, plus citoyen ? La question est aussi inédite que déroutante. Car si la renonciation à la nationalité française est un pas, elle ne garantit pas automatiquement la récupération de la nationalité ivoirienne, surtout dans un contexte où les règles du code de la nationalité peuvent être interprétées de manière restrictive.

Un dilemme juridique et politique

Le cas Thiam cristallise un débat ancien en Côte d’Ivoire : celui de la nationalité, si souvent instrumentalisée à des fins politiques. Faut-il rappeler l’épisode du concept d’ivoirité qui a marqué les années 2000 et nourri l’exclusion de certains candidats ? Aujourd’hui encore, les mêmes démons semblent ressurgir.

Tidjane Thiam, malgré son pedigree international, se retrouve donc dans une position délicate. S’il est établi qu’il a effectivement perdu sa nationalité ivoirienne en 1987, la seule issue serait une procédure de réintégration. Mais cette démarche administrative pourrait prendre du temps… et le temps, à l’approche de l’échéance électorale, est un luxe.

Une stratégie de reconquête risquée ?

En renonçant à sa nationalité française, Thiam a clairement affiché sa volonté de rentrer dans le jeu politique ivoirien avec un ancrage national fort. Ce geste vise aussi à rassurer les électeurs et à clore les soupçons d’un « candidat de l’extérieur ». Mais la stratégie pourrait se retourner contre lui si elle n’est pas accompagnée d’une réponse institutionnelle claire.

Le PDCI, qui voit en Thiam une figure de renouveau et de rassemblement, est désormais face à un dilemme. Faut-il continuer à miser sur un candidat dont la nationalité est juridiquement contestée ? Ou préparer un plan B en urgence ?

Et maintenant ?

L’avenir politique de Tidjane Thiam dépend désormais de deux choses : la rapidité avec laquelle la justice tranchera sur sa situation, et la capacité de son camp à mobiliser autour de cette question. Pour nombre d’analystes, cette affaire pourrait bien être le premier test de l’équité et de la transparence du processus électoral ivoirien.

En attendant, une question reste en suspens : la Côte d’Ivoire est-elle prête à accueillir un président de retour au bercail, ou refermera-t-elle la porte sur l’un de ses enfants les plus brillants ?

Paule Kadja TRAORE

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