Par Paule Kadja Traore
Un pas décisif vient d’être franchi dans la régulation du marché mondial du carbone. L’Organe de surveillance du Mécanisme de crédits de l’Accord de Paris (PACM), relevant des Nations Unies, a adopté un ensemble de normes clés qui renforcent la transparence, la crédibilité et l’efficacité environnementale des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Une avancée majeure pour s’assurer que chaque crédit carbone émis représente une réduction réelle et vérifiable.
Une nouvelle ère de rigueur pour les crédits carbone
Jusqu’ici, le manque d’uniformité dans l’évaluation des projets climatiques alimentait la méfiance autour du marché du carbone. Désormais, avec l’adoption de deux normes fondamentales – la norme de base de référence et la norme de fuite – le PACM impose des garde-fous clairs et ambitieux.
La première norme établit une méthodologie rigoureuse pour estimer les émissions qui auraient été produites sans l’intervention du projet (la « base de référence »). Concrètement, cette référence sera désormais systématiquement abaissée – de 10 % dès le départ, puis d’au moins 1 % par an – afin d’éviter toute attribution excessive de crédits. L’objectif : inciter à une amélioration continue et garantir une réelle contribution à l’objectif de neutralité carbone.
La seconde norme, dite de « fuite », vise à comptabiliser les éventuelles émissions additionnelles générées de manière involontaire ailleurs à cause du projet. Elle assure notamment que les projets forestiers REDD+ soient intégrés dans les stratégies nationales, renforçant ainsi leur cohérence avec les plans climat des pays.
Une gouvernance renforcée et inclusive
Ces normes ne sont pas sorties de nulle part : elles sont le fruit d’un dialogue soutenu avec des experts, des États et des parties prenantes du monde entier. « Nous avons adopté une décision novatrice pour fixer des niveaux de crédits en cohérence avec la trajectoire de neutralité carbone mondiale », a salué Martin Hession, président de l’Organe de surveillance.
Outre l’adoption de ces règles, d’autres décisions importantes ont été prises : un processus de consultation sur le partage équitable des bénéfices avec les pays hôtes, des mesures de renforcement des capacités, ainsi que la mise à jour des projets liés aux cuisinières pour les aligner avec les dernières données scientifiques.
Pour Maria AlJishi, vice-présidente de l’organe, ces nouvelles règles marquent un tournant : « Elles offrent la clarté nécessaire aux développeurs pour enfin concevoir des activités compatibles avec le PACM. »
Et maintenant ?
La suite s’annonce cruciale. Les premières méthodologies basées sur ces nouvelles règles devraient être approuvées d’ici fin 2025, avec une montée en puissance attendue à partir de 2026. Toutefois, une phase de transition s’impose, marquée par un creux temporaire du financement, dû au faible nombre de projets hérités de l’ancien mécanisme pour un développement propre.
L’Organe de surveillance entend continuer à développer les outils nécessaires – lignes directrices, registre du mécanisme, soutien technique – pour assurer une mise en œuvre fluide et efficace. À terme, le PACM devrait contribuer à attirer des investissements climatiques crédibles dans les pays en développement tout en garantissant des réductions d’émissions tangibles.
Encadré : Qu’est-ce que le PACM ?
Le Mécanisme de crédits de l’Accord de Paris (aussi appelé Article 6.4) permet aux pays et aux entreprises d’acheter ou vendre des crédits carbone, à condition que ces crédits soient vérifiables, additionnels et conformes aux objectifs de l’Accord de Paris. C’est une réponse concrète aux besoins croissants de financement climatique, dans un cadre multilatéral transparent
Leave a Reply