Le créateur d’antivirus John McAfee retrouvé mort dans une prison espagnole

John McAfee, pionnier de l’antivirus, s’est suicidé mercredi 23 juin dans une prison en Espagne. Un tribunal venait d’ordonner son extradition aux États-Unis où il était accusé de fraude fiscale.

John McAfee n’est plus. L’homme d’affaires et créateur de l’antivirus du même nom a été retrouvé mort dans sa cellule de la prison de Brians 2, située près de Barcelone, en Espagne. « Apparemment il s’est suicidé », avance une porte-parole des autorités pénitentiaires de Catalogne, sans fournir plus de détails.

De son côté, le ministère de la Justice de Catalogne a affirmé qu’une enquête avait été ouverte après qu’un prisonnier âgé de 75 ans avait été retrouvé mort dans sa cellule. Même s’il n’a pas partagé l’identité du défunt, il a précisé que ce dernier encourait une mesure d’extradition aux États-Unis, ce qui était le cas de John McAfee. Un tribunal espagnol avait autorisé l’extradition de l’homme d’affaires, accusé de fraude fiscale par les États-Unis. « Les gardiens et le personnel médical sont immédiatement intervenus pour tenter de le ramener à la vie mais les médecins ont finalement certifié qu’il était mort », a ajouté le ministère.

DE LA NASA AUX CRYPTOMONNAIES
Connu pour sa personnalité atypique, John McAfee avait commencé sa carrière à la Nasa avant de travailler dans plusieurs entreprises informatiques. Il avait fait fortune en 1987 en créant son propre antivirus et la société qui portait son nom, devenue un des géants du secteur.

Après avoir revendu l’entreprise à Intel en 2010, il était devenu féru des cryptomonnaies, allant même jusqu’à affirmer qu’il gagnait 2 000 dollars par jour grâce à elles. Sa promotion de ces nouvelles devises lui permet d’engranger 12 millions de dollars entre 2014 et 2018.

Problème : cette somme colossale n’apparaît sur aucune déclaration de revenus. À partir de là, tout s’enchaîne. En mars 2020, il est inculpé par la justice américaine pour avoir promu auprès de ses abonnés sur Twitter des opérations liées aux cryptomonnaies mais sans les avertir qu’il allait probablement en retirer des sommes juteuses.

En octobre de la même année, sa non-déclaration le rattrape. Un procureur américain émet un acte d’accusation à son encontre. John McAfee est alors interpellé, le même mois, à l’aéroport de Barcelone, juste avant d’embarquer à bord d’un avion à destination d’Istanbul, puis placé en détention provisoire.

CACHOTTIER SUR SES BIENS ET SON ARGENT ?
La justice américaine demande non seulement son extradition avec un mandat d’arrêt émis via Interpol, mais porte également d’autres accusations envers lui. John McAfee aurait ainsi caché des biens immobiliers, un yacht et une voiture en les mettant au nom d’autres personnes. Le créateur d’antivirus risque jusqu’à 30 ans de prison. Le feu vert donné par un tribunal espagnol à son extradition n’était cependant pas définitif et ne concernait que des infractions commises entre 2016 et 2018. John McAfee pouvait encore tenter un recours judiciaire, et la mesure devait être approuvée par le gouvernement espagnol lui-même.

Ses conditions de détention en Espagne affaiblissaient visiblement l’ancien trublion du monde des affaires. Sa femme Janice avait d’ailleurs estimé qu’il « ne se portait pas bien » en prison où, d’après elle, son mari avait reçu des soins médicaux en retard. Ce 20 juin, elle avait tiré une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur son compte Twitter : « Les autorités américaines sont déterminées à voir John mourir en prison. Il n’y a aucun espoir qu’il ait jamais un procès équitable en Amérique ». Elle en avait aussi profité pour lui souhaiter une bonne fête des pères : « Même si tu passes la journée en prison, sache que tu es aimé et apprécié. »

Quelques jours auparavant, le 16 juin, John McAfee avait déjà pris la parole sur le réseau social. Sans faire référence à son état physique ou psychique, il avait démenti posséder des cryptomonnaies cachées : « J’aurais aimé que cela soit vrai, écrivait-il. Tout ce qu’il me restait a été saisi. Je n’ai rien. Je ne regrette rien ».

UNE VIE DIGNE D’UN FILM
Ne rien regretter semblait le credo de John McAfee. En 2012, il avait défrayé la chronique lorsque son voisin au Belize avait été retrouvé assassiné. L’affaire, qui n’a jamais été élucidée, avait attiré l’attention des médias sur l’intéressé. La police avait découvert qu’il vivait avec une jeune fille de 17 ans et qu’il détenait des armes dans sa maison. Pendant un mois, il s’était lancé dans une cavale, en tentant de demander l’asile politique au Guatemala avant d’être expulsé vers les États-Unis en décembre.

John McAfee assumait totalement sa personnalité fantasque. « Je ne suis pas un fou. Je suis excentrique, courtois, attentionné, gentil, plein d’humour », avait-il répliqué au moment de son arrestation en 2012. Plus discret ces dernières années, il avait néanmoins caressé quelque temps l’idée d’une candidature à la présidentielle de 2020. Fidèle à son côté cabotin, il avait lancé une campagne sous le signe de l’excentricité en vendant des tee-shirts où l’on pouvait lire : « Ne votez pas pour John McAfee en 2020 ».

Une vie digne d’un film du début à la fin qui avait, sans grande surprise, inspiré un documentaire. En 2016, Gringo : The Dangerous Life of John McAfee avait mis en lumière la vie mystérieuse au Belize de celui qui voyait les humains comme des « créatures amusantes ».

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