À Keur Mandoumbé, petit village niché dans la commune de Saly Escale (département de Koungheul), l’ambiance est lourde, à l’approche de la Tabaski. Dans la maison des Diop, les préparatifs de la fête sont éclipsés par une inquiétude grandissante. Leur fils, Malick Diop, étudiant sénégalais devenu malgré lui prisonnier de guerre en Ukraine, reste introuvable depuis plusieurs mois.
Brillant et ambitieux, Malick avait quitté le Sénégal pour poursuivre des études supérieures en Russie. Après l’obtention d’une licence professionnelle, il fait part à ses proches du poids des difficultés financières et de son désir de revenir au pays. Mais contre toute attente, il aurait rejoint les rangs de l’armée russe. Un choix que sa famille, abasourdie, peine encore à expliquer.
Quelques mois plus tard, le couperet tombe : Malick est capturé sur le front ukrainien. Depuis, plus rien. Silence radio. Sa famille tente désespérément d’établir un contact, en vain. Les courriers envoyés aux ambassades de Russie et d’Ukraine à Dakar restent sans réponse. Le ministère sénégalais de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères, alerté à plusieurs reprises, ne pipe mot.
« Nous ne savons pas s’il est vivant, blessé ou soigné quelque part. Ce silence nous ronge », confie Saliou Diop, son frère, la voix tremblante. « Nous avons frappé à toutes les portes, mais elles sont restées closes ».
Au début de l’affaire, la ministre des Affaires étrangères avait affirmé que des démarches étaient en cours, en coordination avec l’ambassade de Russie. Mais depuis, aucune avancée concrète n’a été signalée. Le mutisme des autorités ne fait qu’accentuer la douleur d’une famille en détresse.
Au-delà de l’histoire tragique de Malick, ce cas soulève des interrogations plus larges. Combien de jeunes Sénégalais, partis étudier en Russie ou en Ukraine, sombrent dans l’oubli ? Entre isolement, précarité et désespoir, certains finissent par prendre des décisions extrêmes, loin du regard de l’État et de leurs proches.
À Keur Mandoumbé, l’ambiance est morose. La Tabaski approche, mais le cœur n’y est pas. Le père de Malick, homme pieux et digne, garde pourtant l’espoir chevillé au corps. Dans ses prières quotidiennes, il invoque le retour de son fils et lance un appel pressant : « Je crois fermement qu’il reviendra. Mais seul, je ne peux rien. Nous demandons l’aide de tous. »
En attendant, la famille Diop vit dans l’angoisse, suspendue à un espoir fragile. Leur cri du cœur reste le même : briser le silence, ne pas laisser Malick disparaître dans l’oubli.
Leave a Reply