France: vers un procès en appel de Marine Le Pen avant la présidentielle

Au lendemain de la condamnation à l’inéligibilité immédiate de Marine Le Pen, qui a provoqué un séisme politique en France, la justice a envisagé mardi un procès en appel rapide, ce qui pourrait encore laisser une possibilité à la dirigeante d’extrême droite de participer à la présidentielle de 2027.
La cour d’appel de Paris a indiqué avoir été saisie de « trois appels » après la condamnation de Mme Le Pen, et qu’elle examinerait le dossier « dans des délais qui devraient permettre de rendre une décision à l’été 2026 », soit plusieurs mois avant le scrutin présidentiel.
Mme Le Pen, condamnée lundi pour détournement de fonds publics à quatre ans de prison dont deux ferme aménagés avec bracelet électronique, et cinq ans d’inéligibilité immédiate, exige depuis que « la justice se hâte » pour réexaminer sa condamnation.
En supposant – ce qui est loin d’être acquis – que le jugement en appel lui soit plus favorable, cela laisserait à la dirigeante d’extrême droite la possibilité de se présenter au scrutin pour lequel elle est donnée en tête du premier tour par les sondages.
« C’est une très bonne nouvelle dans laquelle je veux voir le trouble qu’a créé le jugement », a réagi Marine Le Pen dans un entretien publié par le quotidien Le Parisien mardi soir.
– Saisir le Conseil constitutionnel –
Elle a aussi annoncé, vouloir « saisir le Conseil constitutionnel » sur « l’incompatibilité qu’il y a entre une décision d’inéligibilité avec exécution provisoire et la liberté des électeurs qui est inscrite dans la Constitution ».
Elle veut aussi saisir la Cour européenne des droits de l’Homme.
Plusieurs dirigeants politiques avaient également souhaité dès l’annonce du jugement un procès en appel rapide.
Le ministre de la Justice Gerald Darmanin a espéré « un délai le plus raisonnable possible », tout en rappelant qu' »il appartiendra à la cour d’appel de Paris, parfaitement indépendante (…) de fixer la date de cet appel ».
Depuis sa condamnation, Mme Le Pen et le parti Rassemblement national (RN) dont elle est la figure de proue dénoncent un « scandale démocratique », une « ingérence des magistrats », des manoeuvres du « système ».
« S’il utilise une arme aussi puissante contre nous, c’est évidemment parce que nous sommes sur le point de gagner des élections », a lancé Mme Le Pen mardi devant les parlementaires de son parti. « On sera là jusqu’à la victoire », a-t-elle lancé.
Le jugement du tribunal correctionnel de Paris, dans lequel 23 autres personnes et le RN en tant que parti ont aussi été condamnés, a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le monde politique français. Certains à droite comme au sein de la gauche radicale ont regretté la décision des juges ou fait part de leur « trouble », comme l’a fait savoir le Premier ministre François Bayrou.
Socialistes, écologistes et communistes ont de leur côté appelé au respect de la loi.
M. Bayrou a également dit apporter son « soutien » aux magistrats ayant rendu le jugement, cibles de violentes menaces, qui ont donné lieu à l’ouverture d’enquêtes.
– « La justice a fait son travail » –
A l’étranger, la condamnation de Mme Le Pen a suscité les critiques de dirigeants populistes, du Kremlin à Washington en passant par la Hongrie ou le Brésil.
« C’est une grosse histoire (…) Elle n’a plus le droit d’être candidate pendant cinq ans alors qu’elle faisait la course en tête », a déclaré le président américain Donald Trump, lui-même condamné l’an dernier dans l’affaire des paiements cachés à une actrice de films X alors qu’il était en campagne.
En l’état, le RN affiche confiance et détermination, refusant pour l’instant l’hypothèse d’une candidature de Jordan Bardella, dauphin de Marine Le Pen sur le papier.
Un rassemblement « de soutien » à Mme Le Pen sera organisé à Paris dimanche, a annoncé le RN.
Selon un sondage réalisé après le jugement, M. Bardella rassemblerait jusqu’à 36% des intentions de vote au premier tour, un score similaire à celui de Mme Le Pen.
Selon un autre sondage, une majorité de Français (57%) estime que la décision de justice est normale au vu des faits reprochés à Mme Le Pen.
Nadine Garry en fait partie. « Les juges ont eu raison de la traiter au même niveau que tout le monde », estime cette animatrice sportive interrogée à Marseille (sud-est): « c’est la preuve que la justice a fait son travail ».
Le tribunal correctionnel de Paris a jugé qu’un « système » a bien été mis en place entre 2004 et 2016 pour faire faire des « économies » au Front national (devenu RN en 2018), en payant avec l’argent du Parlement européen des assistants d’eurodéputés travaillant en réalité pour le parti.

AFP

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