DÉCAMÉRON DE BOCCACE : LE BEAU RÔLE DU METTEUR EN SCÈNE MAMADOU SEYBA TRAORÉ

Le Sénégal est à l’honneur en Europe avec la participation de Mamadou Seyba Traoré dans l’un des projets de théâtre les plus complexes au monde : Le Décaméron.

Il s’agit de la mise en ligne du recueil de nouvelles du poète italien Boccace, écrites après la pandémie de peste noire de 1348, à Florence.

Pour le metteur en scène, l’initiative du théâtre national « Marin Sorescu » de Craiova s’inscrit dans un double contexte : “La pandémie nous aura brutalement rappelé notre solidaire condition humaine. Elle a également, profondément modifié les rapports sociaux. L’art, d’une manière générale n’y a pas échappé. Des pratiques professionnelles jusque-là inimaginables sans contact direct, ont été mises dans l’obligation de se réinventer, d’une certaine manière, sous peine de disparaître. »

Avec 99 autres directeurs de théâtre issus de 100 pays, il a réuni des artistes de 100 pays pendant 100 jours.

Sous le haut patronage de l’organisation UNESCO-ITI, Seyba Traoré et Cie ont chacun reproduit l’une des histoires du livre, faisant un parallèle entre la peste du XIVe siècle et la pandémie de Covid-19. Ce qui rend le projet inédit est que ces réalisateurs ne se sont jamais rencontrés et n’ont jamais vu face-à-face les acteurs. Lesquels ont répété uniquement en ligne. Tandis que les personnages du Décaméron se sont mis en quarantaine à l’extérieur de Florence.

“Boccace est un auteur italien du XIVème siècle. Dans l’œuvre en question, il évoque un groupe de dix jeunes, sept filles et trois gars, qui fuient Florence, sous le joug terrible de la peste – tiens donc -. Autant pour se distraire que pour meubler la monotonie pesante de ce « confinement », ils racontent chaque soir, chacun à son tour, une histoire, ce, pendant dix jours. D’où le titre du livre « Décaméron » signifiant dix journées en grec”, rappelle Mamadou Seyba Traoré.

“Les initiateurs du projet ont donc coopté des metteurs en scène et des chorégraphes pour adapter, sans aucune contrainte, ces histoires. Si l’adaptation était laissée libre, il n’en fallait pas moins préserver la cohérence de l’ensemble”, a tout de même précisé le professeur, estimant que la scénographie était unique : des cubes de différentes dimensions.

“De costume également le code couleur était uniforme : le noir. Enfin la durée : 15 minutes. Distribution : un seul comédien, roumain, bien entendu, proposé par la production. S’y ajoute que metteurs en scène et chorégraphes étaient contraints de travailler à distance avec l’artiste, le barrage linguistique intervenant comme une difficulté supplémentaire. Au total, il s’est confirmé ce qui est une vérité quelque peu galvaudée : l’art n’a pas de frontières. La distance ni la langue ne peuvent constituer un frein dans une démarche de création mettant en présence des professionnels”, a poursuivi notre interlocuteur.

Le monde, une maison interconnectée

En farouche défenseur du fait que le théâtre est l’art de la présence immédiate, basée sur une relation sans intermédiation aucune entre un artiste et un public, ce passage au virtuel a été une expérience enrichissante, pour lui, révélatrice et une invite à reconsidérer certaines certitudes.

“Il n’est pas impossible, après tout, de réconcilier la vérité première du théâtre et les nécessaires mutations induites aussi bien par les avancées technologiques que les situations nouvelles qui imposent leurs lois à l’humanité tout entière”, a-t-il  expliqué.

Il a enfin salué l’initiative d’une « mondialisation » qui rétablit la culture comme ciment et passerelles entre les hommes condamnés à vivre ensemble ou à périr ensemble. “Plus que jamais le monde se révèle comme un village planétaire, voire une seule et unique maison interconnectée”, déclare M. Traoré non sans rendre hommage au comédien Vlad Udrescu, l’administration et les techniciens du Théâtre Marin Sorescu pour le sérieux et la rigueur dont ils ont fait preuve tout au long de ce travail qu’il juge passionnant.

lejournaldedakar.info

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