Les Nations Unies et les ONG lancent un cri d’alerte : le cumul des crises risque de dévaster le Sahel

 Les agences humanitaires des Nations unies et les organisations non gouvernementales ont lancé un cri d’alerte aujourd’hui au sujet de la détérioration rapide de la crise du Sahel, entrainant des besoins humanitaires à travers la région à des niveaux sans précédent, la plupart résultant de l’intensification des conflits, de l’insécurité alimentaire croissante, des inégalités structurelles et des conséquences directes et indirectes de la pandémie COVID-19, telles que la montée de la violence sexiste. Ces crises cumulées sans précédent risquent de dévaster la région, mettant en danger des millions de personnes, et nécessitent une attention urgente et un soutien accru.

En 2020, 24 millions de Sahéliens, dont la moitié sont des enfants, ont besoin d’une assistance et d’une protection vitales, le nombre le plus élevé jamais enregistré. En raison de la violence généralisée et des catastrophes naturelles, 6,9 millions de personnes sont confrontées aux conséquences désastreuses des déplacements forcés. Plus de 4,5 millions de personnes sont déplacées à l’intérieur de leur pays ou réfugiées – soit un million de plus qu’en 2019, et 2,5 millions de retournés luttent pour reconstruire leur vie. « Le temps presse alors que nous faisons face à une crise sans précédent en matière de déplacement et de protection dans la région. Des centaines de milliers de personnes ont déjà été contraintes de fuir et doivent maintenant faire face à l’incertitude supplémentaire apportée par le coronavirus », a déclaré Millicent Mutuli, Directrice du Bureau régional du HCR pour l’Afrique de l’ouest et centrale. « Les communautés locales à travers la région ont fait preuve d’une générosité remarquable en les accueillant mais ne peuvent plus faire face sans un soutien urgent car les capacités nationales sont dépassées. La situation au Sahel était déjà en train de devenir rapidement intenable, avec une crise humanitaire à plusieurs niveaux. Nous devons agir rapidement pour éviter une catastrophe humanitaire. »

L’insécurité et les attaques perturbent gravement les services sociaux de base, compromettent l’avenir de milliers d’enfants et privent les communautés touchées par la violence de services essentiels. La fermeture des écoles constitue un obstacle supplémentaire à l’apprentissage et prive les enfants, en particulier les filles, d’un environnement protecteur. « Les conflits, les déplacements, la violence et maintenant, la pandémie COVID-19, ont des effets dévastateurs sur les enfants, leur santé, leur état nutritionnel, leur éducation et leurs droits à la protection. Quelque 9,7 millions d’enfants sont menacés de malnutrition aiguë, dont 3 millions de malnutrition aiguë sévère. Les enfants et les jeunes sont également confrontés à un risque accru d’être victimes d’abus et de violence, d’exploitation sexuelle, de mariages précoces et de grossesses adolescentes. Il est crucial que des mesures soient mises en place pour freiner et arrêter la propagation de la pandémie COVID-19, pour répondre aux besoins immédiats et à plus long terme des enfants », a déclaré Marie-Pierre Poirier, Directrice régionale de l’UNICEF.

L’insécurité alimentaire en 2020 devrait atteindre des pics sans précédent, avec plus de 12 millions de personnes confrontées à un manque critique de nourriture. « Le Sahel était déjà confronté à une augmentation stupéfiante de l’insécurité alimentaire due à un cocktail toxique de conflits armés, de déplacements de population, de changement climatique et de perturbation des échanges commerciaux à l’intérieur et à l’extérieur des frontières avant que la pandémie COVID-19 ne balaye la région. Alors que la période de soudure annuelle approche et que l’impact socio-économique de cette pandémie commence à se faire sentir, nous pourrions assister à une situation catastrophique pour des personnes déjà vulnérables si l’aide humanitaire n’est pas soutenue et si des mesures de protection sociale solides ne sont pas mises en place par les gouvernements », a déclaré Chris Nikoi, Directeur régional du Programme alimentaire mondial.

« A la FAO, nous sommes préoccupés par la succession et la superposition des crises vécues au Sahel, de l’insécurité alimentaire, à la pandémie COVID-19 et à l’invasion potentielle de criquets pèlerins qui pourraient dévaster les moyens d’existence et la production alimentaire et affaiblir la résilience du Sahel », a déclaré Gouantoueu Robert Guei, Coordonnateur sous-régional de la FAO. Les communautés pastorales, déjà durement touchées par les effets du changement climatique et de l’insécurité, sont également affectées par la fermeture des frontières, ce qui risque d’accroître les conflits entre éleveurs et agriculteurs.

La pandémie COVID-19 a le potentiel de briser les systèmes de santé fragiles, en frappant le plus durement les populations vulnérables. « Ces communautés luttent pour survivre dans des conditions de vie précaires, sans accès adéquat à l’eau et à l’assainissement, et sont déjà confrontées à de multiples risques d’épidémie », a averti Mamadou Diop, Directeur régional d’Action contre la Faim. « Nous devons préserver l’accès des populations aux services de santé, y compris les services de santé psychologique et sexuelle, en particulier dans les zones touchées par les conflits, où les besoins dépassent les ressources disponibles ».  Une coordination et des liens étroits entre les opérations sanitaires et humanitaires seront essentiels pour atténuer les conséquences multisectorielles de la pandémie et garantir une réponse cohérente et efficace pour protéger les plus vulnérables.

Certaines personnes à risque restent bloquées dans des situations précaires, notamment en raison de la fermeture inattendue des frontières. « Les migrants et les populations déplacées ont un accès limité aux systèmes de santé publique et ne peuvent pas être testés ou traités contre la maladie COVID-19 », a déclaré Sophie Nonnenmacher, Directrice régionale a.i. de l’OIM. « Cette pandémie est une opportunité de renforcer le leadership des gouvernements pour la construction de sociétés plus inclusives en les incluant dans les plans nationaux de préparation et de réponse, quel que soit leur statut ».

Avec l’insécurité croissante dans la région, il est également devenu de plus en plus difficile d’accéder aux communautés vulnérables. « La violence et les opérations militaires ne s’arrêteront probablement pas malgré la pandémie COVID-19 et continueront à poser des problèmes importants en termes d’accès et de réponse humanitaire fondée sur des principes. Les travailleurs humanitaires sont en première ligne de la réponse dans les communautés déplacées et d’accueil, et ils sont essentiels pour protéger ces communautés d’une épidémie dévastatrice », a déclaré Maureen Magee, Directrice régionale du Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC). Les équipes doivent pouvoir rester sur le terrain afin de fournir une assistance, en adaptant leur réponse pour garantir que l’aide essentielle soit apportée en toute sécurité.

La solidarité régionale et internationale est essentielle, et le soutien des bailleurs est nécessaire de toute urgence. « Nous avons besoin d’une action concertée urgente pour soutenir les opérations humanitaires vitales, à un moment critique où la période de soudure approche et où la pandémie progresse rapidement dans la région. Il est crucial que les ressources et les capacités ne soient pas détournées des opérations humanitaires en cours », a déclaré Julie Belanger, Cheffe du bureau régional d’OCHA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre. « Si nous n’agissons pas maintenant, la crise coûtera encore plus de vies, dévastera des communautés et se propagera dans de nouvelles régions et dans les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest. L’avenir de millions de personnes, dont quatre sur cinq ont moins de 35 ans, est en jeu ».

Des ressources supplémentaires sont requises d’urgence afin de permettre aux opérations humanitaires de prendre de l’ampleur et d’inverser la crise. En 2020, la communauté humanitaire a besoin de 2,8 milliards de dollars pour apporter une assistance à 17 millions de personnes au Sahel. En mai, seuls 18% des fonds ont été reçus. De plus, selon la deuxième itération du Plan de réponse humanitaire global COVID-19 (GHRP) du mois de mai 2020, le besoin financier pour répondre à la pandémie au Sahel s’élève à 638 millions de dollars, avec moins de 4% des fonds perçus.

Communiqué de presse: les Nations unies et les ONG

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